Version 5.5_Page 11-11_ décembre 2024

Rappel

Un penty est, comme son nom l’indique, un bout de maison.

En principe une maison entière comporte deux fenêtres en façade encadrant une porte. Il y a une autre porte de l’autre côté, juste en face de la première. En principe également il n’y a pas de fenêtre ouvrant sur l’arrière. Bien évidemment il y a des exceptions et la porte avant n’est pas toujours rigoureusement au milieu de la façade.

Le bout de maison (penty) ne compte, qu‘une fenêtre mais il y a toujours une porte devant et une autre derrière, juste en face.

La porte percée sur le devant est la porte du ‘dimanche’, qui ne s’ouvre, que pour les grandes occasions ou les visiteurs. Pour aller aux champs on utilise la porte arrière.

C’est le principe de base mais il y a ensuite toutes les variantes. 

Le Penty est sur StreetView

Il donne sur la route de Trégoudan. Il y a à droite un second Penty, le penty ‘JTK’ et entre les deux l’ancien logement du grand-père Louarn.

Ty bian ou la vielle maison

La première maison, appelée ici ‘le penty JMP’, figure sur le cadastre de 1830 ; elle est sur une parcelle, qui porte le numéro 421 (et qui est une partie de Parc Leur) et avec comme propriétaire Jean Marie Penfrat, le père de Jacques Penfrat. On les retrouvera dans plusieurs documents.

L’aire à battre est la zone identifiée au nord de la parcelle. En fait la parcelle a été coupée en 2 et l’aire à battre aussi, sachant, qu’il y a une autre aire à battre un peu plus loin sur la gauche comme le montre la photographie aérienne de 1919. On notera, que la disposition des parcelles a également changé entre 1830 et 1919. elle changera encore lors du remembrement de la commune de Roscanvel.

En 1848 Jean Marie Penfrat, qui était à l’étroit dans la petite maison, a construit sur cette même parcelle 421 une maison plus grande, qui prend appui sur le pignon ouest de la première; cette grande maison était au début un débit de boisson, comme il en existait autrefois beaucoup le long des routes. Elle est visible sur la photo ci-dessus avec un certain nombre de dépendances, dont certaines ont disparu progressivement.

Cette première maison a été achetée par Auguste Laé et Véronique Quélen le 2 mars 1870 à des héritiers de Jacques Penfrat. Elle était alors qualifiée de « vieille maison », par opposition à la maison mitoyenne de 1848.

Elle donne du levant à Alain Laé, qui avait épousé la fille de Jean Thomas Keraudren et hérité de la maison voisine, dont il sera question plus bas (le penty ‘JTK ‘).

Elle donne du couchant à Quélen, car la grande maison a été vendue vers 1868 à M. Jean Pierre Quélen de Rostellec.

Cette maison est mentionnée dans trois autres documents :

– Le partage des biens de Françoise Mailloux, veuve de Jean Marie Penfrat,  réalisé le 2 décembre 1850 ; le premier lot a été attribué à Jacques Penfrat.

– Le bail du 19 février 1861 à Jean Guillaume Stipon, maçon habitant Quélern ; c’est dans ce bail que la maison est appelée Ty Bian, nom, qui a été conservé avec le « y » et sans « h ». Le bail mentionne bien l’aire à battre.

– la sommation du 23 février 1870 de Jean Guillaume Stipon à l’encontre de ses bailleurs.

Visiblement la maison était en très mauvais état et les propriétaires ont préféré la vendre à Véronique Laé, plutôt que de faire des réparations. La vente a eu lieu 7 jours après la sommation, ce qui parait bien rapide.

Il faut rappeler que les 5 héritiers de Jean Marie Penfrat avaient interdiction de vendre leurs lots du vivant de leur mère, qui avait conservé l’usufruit des biens propres de Jean Marie Penfrat. Après son décès en 1867, les 5 héritiers se sont empressés de vendre leurs parts. Nous avons  les copies des lots 1 et 5.

La réhabilitation

Après avoir servi d’habitation pendant de nombreuses années, elle a fini comme étable, avant d’être réhabilitée au début des années 70 avec la maison adjacente, dont il sera question ci-dessous.

La toiture avait été endommagée pendant la dernière guerre ; elle avait refaite en récupérant des tuiles du chantier d’Auguste Laé. A l’occasion de la réhabilitation des ardoises ont remplacé les tuiles, d’abord de « fausses » ardoises, puis, plus récemment, de vraies ardoises.

Faute d’avoir fait des photos de la maison avant sa réhabilitation au début des années 1970, il ne reste comme témoins extérieurs, que la porte arrière, maintes fois rehaussée, et une petite fenêtre, également à l’arrière et qui a échappé aux modifications successives.

Il n’y a pas beaucoup de recul; il faut alors monter sur le puits. L’important ce sont les jambages de la porte, dont la présence est caractéristique des maisons anciennes.

Tout l’intérieur a été refait. Il reste cependant la cheminée, qui a été remontée à l’identique. Elle a les mêmes dimensions, que celle de la grande pièce du manoir de Quélern.

Le linteau et les corbeaux sont en bois et non pas en pierre comme dans le manoir; par contre elle ressemble beaucoup à la cheminée de la cuisine du manoir de Quélern, qui est cependant plus petite un linteau et des corbeaux en bois.

J’ai vu passer une vidéo prise chez l’une des infirmières de Roscanvel; il y avait également une cheminée de la même facture. 

Le saloir a été comblé mais son emplacement est encore visible.

Quand a-t-elle été construite ?

Il n’y a pas de date au dessus de la porte d’entrée, comme dans toutes les autres maisons du village d’ailleurs. La maison a été remodelée à plusieurs reprises avec parfois des éléments de récupération comme le montrent les deux photos ci-dessus. Pourtant elle est très ancienne; les dimensions de la cheminée en sont la preuve.

Etait-ce un bien de la famille Penfrat?

Selon les documents de la boite et le cadastre, le premier propriétaire connu est Jean Marie Penfrat, qui habite Trégoudan dès le début du 19ème siècle. Si, d’une manière générale, la famille Penfrat est plutôt de Kerguinou, ou parfois de Kerraguennec, il y a aussi des Penfrat à Trégoudan, comme Bernard Penfrat, dont les enfants naissent à Trégoudan dès 1703. Un essai de déchiffrage de la population du village au début du 18ème est repris dans la page 23-21.

Certes il y a beaucoup d’individus prénommés Bernard dans la famille Penfrat, comme il y a beaucoup de Jean ou de Jean Marie. Il est possible aussi, que plusieurs familles aient habité le village de Trégoudan, sachant, que plusieurs générations pouvaient cohabiter sous un même toit et parfois même dans une seule pièce.

Il est possible aussi, que tous les remariages n’aient pas été identifiés comme tels.

Toutefois, compte tenu de la taille du village, il est probable, qu’ils ont tous habité Ty Bian. Dans ce cas la maison peut alors très bien venir de l’une des épouses, notamment de Catherine Salaün, épouse de Bernard Penfrat.

Ou plutôt un bien de la famille Carn?

En effet une relecture des documents conduit à une autre piste plus simple : ce serait un bien de la famille Carn, que l’on retrouve à plusieurs reprises dans notre généalogie. En effet en comparant les documents d’achat des deux pentys et en reprenant le cadastre il semble plus probable que les deux Pentys soient issus du démembrement des biens de Jeanne Carn , mère de Jean Marie Penfrat et de Marie Jeanne Penfrat, épouse de Jean Thomas Keraudren.

D’ailleurs les deux pentys ne figurent pas dans les biens partagés entre les héritiers de Joseph Penfrat. Le démembrement a donc eu lieu avant.

Marie Jeanne Penfrat est née en 1772 et  Jean Marie Pendrat en 1775; leur mère Jeanne Carn est décédée en 1779 et Joseph Penfrat s’est remarié très vite pour avoir quelqu’un qui s’occupe des deux enfants. Par contre le partage n’a probablement pas eu lieu avant la majorité des deux enfants, donc entre 1800 et le décès de Joseph Penfrat en 1818.

Pour faire simple, on va  dire, qu’une construction existait déjà à cet endroit à la fin du 18ème siècle.

Cependant la taille de la maison (7mx4,70m à l’intérieur) et celle de la cheminée (1,90m de largeur pour un linteau à 90cm) semble indiquer, que l’on serait plus proche du début du 17ème.

Le penty ‘JTK’

L’acquisition de 1888

Le second Penty a été acheté par Véronique Quélen aux héritiers de son oncle Allain Laé, qui l’avaient acquise après le décès de sa première femme Marie Josèphe Kéraudren, fille de Jean Thomas Keraudren. En 1830 elle avait donc été inscrite au nom de ce dernier.

Après le décès de Marie Josèphe Kéraudren la maison a été attribué à son fils François Laé, qui est décédé peu de temps après. Puis Allain Laé s’est remarié et a eu des enfants de sa seconde épouse. La vente a eu lieu le 8 juillet 1888.

Les cohéritiers étaient alors Allain Laé et les enfants du second mariage nés avant le décès de François Laé.

La maison

Le Penty figure sur le cadastre de 1831 sous le numéro 424. Il n’y a pas de terrain autour, mais la surface indiquée (49 m²) comprend la crèche attenante.

C’est par erreur que le notaire écrit que la maison est située dans la commune de Crozon. Il a recopié un ancien acte de propriété, antérieur au rattachement du village de Trégoudan à Roscanvel, donc antérieur à 1851. Ce devait être la succession de Marie Josèphe Keraudren.

Les dimensions données dans l’acte de vente pour la maison correspondent assez bien aux dimensions intérieures existantes. Il faudrait donc rajouter l’épaisseur des murs pour retrouver les 49 m² du cadastre.

Liors eost

On retrouve bien l’autre partie de l’aire à battre avec la galerie, dont il est question dans la page précédente.

Pour le cadastre il s’agit de la parcelle 423, qui fait 560 m² ; la différence se trouve donc dans la galerie. La galerie a disparu et il n’est pas facile de retrouver son emplacement d’origine, car elle a définitivement disparu lors que la construction de l’impasse des îles. Pourtant, dans ce même cadastre, le nom de Liors Eost a été attribué à une parcelle différente, située au sud de la route de Trégoudan (parcelle 462) et appartenant à la veuve de Jean Folgar. Chacun avait donc son aire à battre et une zone de stockage avec un local, où le paysan stocke son blé : Eost = la récolte .

Allain Laé a habité le penty avec sa femme, avant le décès de celle-ci. Ensuite il est difficile de savoir, qui l’a occupé.

D’après Grand-Mère la dernière locataire a été Germaine Corre mais c’est contesté par Marie Claire Vianne, sa petite fille.

La crèche entre les deux pentys

Entre les deux pentys il y a une crèche, qui dépendait du penty ‘JTK’ et qui a été un moment une habitation malgré sa superficie réduite (de l’ordre de 7m²). D’après Grand-mère le dernier habitant a été le grand père Louarn, qui l’a quittée en emportant le volet, qu’il avait installé sur la fenêtre. Il reste les gonds.

Cette fenêtre ressemble beaucoup à celles que l’on peut voir dans d’autres villages et qui ont été récupérées sur l’ancienne chapelle Sainte Catherine. La chapelle était située sur le chemin, qui allait de Kerraguennec à Mencaër. Elle figure toujours sur le cadastre Napoléonien, alors qu’elle devait avoir déjà disparu.

Fin décembre 2021 il y a une maison à vendre à Roscanvel, qui possède une fenêtre similaire. Elle est surmontée d’une pierre, qui porte la date de 1628 et le nom de Tépot (= Thépault). Les deux fenêtres ont probablement la même origine. Par contre la nôtre a voyagé. Dans la même annonce il y a aussi  une photo d’une cheminée, qui a la même allure, que la nôtre. 

La maison à four

L’acte de vente mentionne aussi une maison à four.

Le four est probablement la construction qui porte le numéro 453, actuellement en ruine et appartenant aujourd’hui à d’autres propriétaires. Le transfert a été fait avant ou à l’occasion du remembrement de la commune de Roscanvel.

Il ne faut pas confondre ce four avec celui qui a été retrouvé sur la parcelle AK186.

La réhabilitation

Pendant longtemps la maison a été utilisée comme habitation, puis comme annexe, servant à la fois d’atelier de réparation des outils de ferme et de lieu pour faire cuire des aliments pour les cochons, comme en a témoigné l’état de la poutre de la cheminée, qui n’a pas pu être remontée..

Ici aussi la réhabilitation a modifié l’aspect extérieur, notamment la façade tournée vers l’est. La porte a été supprimée au profit d’une percée du mur mitoyen pour joindre les deux maisons. La toiture initiale en ardoises a été remplacée après la guerre par une couverture en fibrociment. Elle a été refaire en ardoise, à l’occasion de l’aménagement des combles. La cheminée n’a été supprimée qu’en avril 2013 ; elle était pourtant la cause de nombreuses infiltrations.

 

Si la porte avant a disparu, la porte arrière, par contre, a été remontée à l’identique. C’est aussi une porte de récupération, car il manque l’une des pierres.



Et elle a aussi de belles jambes.