Version 5.4_Page 34-12_ décembre 2023

 Parmi les 300 documents collectés, seuls une trentaine concerne l’achat de terres bien identifiées. Il n’a pas été tenu compte des achats des fermes, car les prix semblent déconnectés des prix des parcelles individuelles.

 Le graphique ci-dessous donne le prix de vente constaté dans les actes en F/m².

 Dans la plupart des cas où la vente concernait plusieurs parcelles, il n’y a pas de prix séparé pour les labours et les terres à lande; on a donc un prix moyen.

Au 19ème siècle les prix sont stables ou en baisse. La hausse n’est sensible, comme pour les fermages, qu’après l’arrivée du franc Poincaré, donc après 1920.

Les écarts importants sont parfois liés à des prix spéciaux « famille » ou des terres vaines rajoutées en plus (par exemple en 1929 une partie de « Parc Cardinal » a été vendue avec 3 parcelles de lande, pour 0,18F/m² en moyenne ; or  le même jour une autre partie de  « Parc Cardinal »a été vendue pour 0,81F/m²).

Les achats sont concentrés sur la période 1887-1898, avec 43% des prix recensés.

Le prix moyen est de l’ordre de  0,15F/m².

Il n’y a pas d’écart significatif entre les labours et les terres à lande à Trégoudan, sauf dans quelques cas, comme un bord de falaise « ménez ar cap » à 0,04F/m² et « menez du » à 0,08F/m² alors qu’il s’agit ici d’une terre labourable.

La famille Laé a surtout acheté des terres labourables à Trégoudan.

A Rigonou, à l’inverse, elle a surtout acheté des terres à lande, nettement moins chères : 0,06 à 0,08F/m² au 19ème siècle et 0,30F/m² en 1929.

 Il y a eu quelques achats à Kerellot, surtout auprès des héritiers d’Alain Laé, avec des prix très bas en 1911 et 1914 (0,08F/m² pour des terres labourables). Il faut signaler qu’Augustine Laé a acheté à son père « Parc Nevez » à Kerellot pour 400F en 1893, parcelle qu’elle a revendu à Jean Laé en 1914 avec 8 autres parcelles pour le même prix de 400F.

 Le prix élevé noté en 1888  concerne une petite parcelle dans « iz al liorzou », achetée pour terminer le regroupement des différents morceaux de la prairie.

 En tenant compte de l’érosion monétaire, les prix des terrains sont assez proches de ceux de 2018. Certes notre échantillon ne peut pas se comparer à des moyennes régionales, mais, dans l’ensemble, nous restons dans l’ordre de grandeur des prix pratiqués dans le département, en se rapprochant même des prix pratiqués aujourd’hui dans la région la plus riche : le haut Léon

On note cependant que la crise de 1929 a fait chuter les prix.

Dernière information : dans la succession d’Émilienne Le Lann le prix des terres a été fixé à 0,16€/m². Cela correspond à la moyenne des prix les plus bas car la plupart des terrains se trouvent en zone N ou NS ou même dans la zone d’intervention du Conservatoire du Littoral. En fait selon la dernière version du PLUI, il n’y a même pratiquement plus de terres agricoles à Trégoudan.

La cession au Conservatoire du Littoral des parcelles situées dans sa zone d’intervention (essentiellement entre la mer et la RD355 s’est faite au prix uniforme de 0,30€/m². La vente au Département (SAFI) des parcelles situées à Rigonou entre la RD355 et le GR34 a été faite sur la base de 0,40€/m² alors que ce sont dans les deux cas des parcelles proches de la mer et que c’est probablement le même service qui a fixé les prix d’acquisition.On est en gros dans la même zone de prix que celle des terres de la région de Châteaulin ou du sud de la Cornouaille. 

 Les maisons ne valaient rien

 La ferme de Rigonou, payée 5400 francs en 1854, comprenait une maison, des dépendances et 11 hectares de terres agricoles, essentiellement des terres labourables. Achetées isolément ces terres auraient valu deux fois plus.

 A l’exception des maisons de Camaret, les bâtiments ne valaient rien ou presque. Seule la terre comptait. On voit ici aussi l’effet de la vente à la découpe.

 On pouvait vendre aussi plus cher des terres isolées, convoitées par des voisins, qu’un ensemble de parcelles dispersées, notamment dans le cas de Rigonou.

 Cela n’est peut-être pas aussi simple comme on va le voir.

Que dire du prix des fermes?

On compare des pommes et des choux

Il est difficile de comparer les prix d’achat des fermes, car on ne connait pas toujours la superficie des terres, qui y sont rattachées. On ne sait pas non plus, quelle est l’importance réelle des immeubles, maison et crèches, même si on peut se rattacher au cadastre de 1830, qui semble être assez précis dans ce domaine. Il y a des habitations sans étage, des moitiés de maison, des maisons avec étage…

 En outre pour certaines fermes on ne dispose que des valeurs déclarées à l’assurance (par exemple lors du déménagement de Jean Laé de Rigonou vers Trégoudan) ou d’une estimation donnée par le notaire.

 Mais on peut quand même dresser un tableau, sachant que les prix des terres ont peu varié jusqu’à la fin du 19ème siècle.

 Il manque la maison de la rue de la Mairie, dont a hérité Pierre Le Lann, et celle de Tonton Louis, mais on est déjà dans une période, où les prix ont beaucoup évolué. La liste s’arrête donc en 1911.

La ferme de Jean Derrien

An 13

2100

Avec 3 hectares de terres 

Maison de la rue Poulpatré

1849

7800 (dont 4200 d’usufruit)

C’est en fait une maison double avec étage et comble

Rigonou

1854

6400

Mais avec 11 hectares de terres

Ty Maurice Téphany

1865

2400

Pour la moitié seulement, donc près de 5000F pour le tout

Tybian

1870

6000 

Avec peu de terres

Le penty de Jean Thomas Keraudren

1888

500 seulement, mais c’est aussi la moitié d’une maison  

C’est à peu près le prix payé par Gwenola pour la maison de Georgette, autrefois appelée Ty Maurice Téphany

La maison de la rue de la Marne à Camaret

1908

5050 sans les frais

RdC+étage et combles

Estimée par erreur par le notaire 500000 F seulement en 1961, mais valant le triple, après la rectification de 1969), ce qui équivaut à 6000 F de 1908

Le Pors

Vers 1911

Assuré pour 5000 F, crèches non comprises

3000 pour la maison principale et 2000 pour la cuisine

Les 2 maisons de Kerloc’h

Vers 1911

Assurées pour 3000 F et 2000 F, crèches non comprises

C’est celle de Véronique Quélen qui est assurée pour 3000F; celle de Laurence Mérour  a été estimée 3000F en 1882 pour calculer les droits de succession

Comparaison n’est pas raison

  Le faible nombre de prix  de vente collectés et leur grande diversité ne permet pas de tirer des conclusions précises sur le prix des fermes, mais le tableau donne quand même l’impression d’une lente augmentation du prix des habitations, alors que le prix des terres est resté constant pendant la même période.

 Ce qui surprend c’est l’écart de 400 F seulement entre Rigonou et  Ty Bian, alors qu’il y a 8 hectares de terres de différence, c’est-à-dire 4000 à 5000 F, si on admet que les terres vendues avec les fermes valent deux fois moins, que celles vendues isolément.

  Ce qui surprend aussi c’est le faible prix payé pour le second Penty, mais il était peut-être en très mauvais état. Plus probablement les cousins de Kerellot avaient de grands besoins d’argent frais, puisque des terres ont été également achetées à un prix très inférieur au marché.

 Jean Derrien a peut-être également bénéficié d’un prix spécial, ce qui le mettrait à part et dans ce cas on arrive alors à un prix de l’ordre de 5 à 6000 F à la fin du 19ème siècle.

 Les valeurs assurées et celles estimées par le notaire ont été certainement sous-évaluées. Il faut donc s’en méfier.

 Dans la succession de Jean Laé de 1961 une valeur de 500.000 F a été retenue pour la plupart des biens, mettant sur le même plan les fermes et la maison de la rue de la Marne. Celle de la rue de Bruxelles est estimée 400.000F; elle était probablement plus petite.

Malgré cela on retrouve bien cette équivalence entre les fermes (sans étage) et la maison de Camaret (avec un étage), qui ressort du tableau, même si la valeur retenue est fausse, puisqu’elle sera revue en 1969 lors de la succession de Joseph Laé.

 Comparaison avec aujourd’hui (avant la ruée provoquée par la Covid19)

 Il est encore plus difficile de comparer ces habitations à celles, qui sont mise en vente en ce début de 21ème siècle. Autrefois il n’y avait que des murs et un toit ; aujourd’hui il y a le chauffage, l’électricité, les sanitaires…

 Cependant, si on met à part la maison de Georgette, qui est un cas particulier, on constate qu’au centre de Camaret il y a actuellement des maisons à rénover, qui sont proposées à des prix très bas : entre 60 et 80 000€, ce qui, traduit en francs de 1900, donne une fourchette de 15000 à 20000 F(1900), plus de 3 fois le prix des maisons vers 1908, mais les surfaces annoncées sont aussi 2 à 3 fois plus grandes.  Il y a quelques années un Penty en partie ruiné a été vendu 70000€ à Quélern.

 Enfin plusieurs maisons anciennes étaient à vendre dans la presqu’ile autour de 100000€, prix que n’a pas atteint la maison de Louis Maudire, vendue récemment, mais les prix affichés sont rarement les prix de vente réels. 

La ruée vers l’ouest provoquée par la Covid19 et les restrictions drastiques incluses dans le PLUI (dans sa version définitive) ont changé complètement la donne. Il ne reste plus rien des nombreuses maisons à vendre comptabilisées il y a quelques années (jusqu’à 40 à Roscanvel seulement, soit 10% du parc de maisons secondaires) avec pour conséquence une forte hausse des prix de vente. Les interdictions de construire en dehors du bourg de Roscanvel et de la cale de Quélern vont assécher le marché. Il en est de même à Rigonou, où toute construction nouvelle est interdite.

 

 

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